Avez-vous aussi connu ça?
Au programme de la colo, Les JO faisaient partie des activités incontournables, avec des courses (en sac ou à saute-mouton), des tirées de cordes par équipes, des transports de charges chronométrés, des tirs au but et j’en passe…mais je ne peux pas passer, justement, sur le lancer de flèches polynésiennes.
En effet cette épreuve combinait à la fois la précision et la distance et nécessitait beaucoup d’entraînement et aussi de l’adresse. Bien entendu l’activité, présentant tout de même quelques risques, était bien encadrée par les monos ; les règles de sécurité étaient proches de la pratique du tir à l’arc.
D’abord il fallait trouver une tige de bois, par exemple du noisetier frais d’environ 2 cm de diamètre, qui soit bien rectiligne et effeuillée sur environ la longueur épaule-doigts de l’usager. Les monos nous aidaient à la scier mais ensuite il fallait préparer chaque extrémité :
- On affinait une extrémité en pointe avec notre canif.
- On fendait en croix axiale l’autre extrémité sur plusieurs cm pour y fixer les ailerons – à cette phase aussi les monos nous aidaient en utilisant une petite hache de scout.
- Puis sur le fuselage on taillait au canif une petite encoche oblique un peu en avant des fentes de l’extrémité arrière.
Il était permis de fignoler la flèche en retirant l’écorce, en peignant des signes personnels bariolés. Puis il fallait habilement glisser des petits cartons découpés en triangle dans les fentes arrière. Mais chacun pouvait modifier la forme selon ses goûts et ses croyances sur l’efficacité de tel ou tel profil. Là aussi il était possible de choisir la couleur du carton et même de le peindre. C’était chouette ; et l’arsenal était varié en taille mais aussi en fantaisie.
Chaque tireur recevait un bout de ficelle un peu plus long que sa flèche perso. En effet ce « cordon propulseur » était d’abord raccourci par un assez gros nœud du côté qui le coincerait dans l’encoche, et il devait être possible lors de la mise en tension, de l’enrouler de quelques tours autour de l’index.
Chez les grands, certains ont tenté d’améliorer les performances en lestant la pointe avec un bobinage de fil de fer. Mais cette initiative fut rapidement proscrite, justement à cause des incroyables performances réalisées.
Pour lancer cette flèche polynésienne, on la tenait un peu comme un crayon, les doigts le plus près possible de la pointe. La cordelette de propulsion devait être bien tendue entre l’index et l’encoche où le nœud la retenait. Le mouvement majestueux s’apparentait à celui du lancer de javelot. Certains tireurs tentaient d’améliorer leur jet en prenant de l’élan. Et parfois, accidentellement, la flèche restait solidaire de la cordelette et ne s’envolait pas car le nœud était un peu trop coincé. Sinon la trajectoire et les performances nous impressionnaient. Il faut reconnaître que le vaste terrain pentu en direction de la Cleurie favorisait cette pratique. Et lors des compétitions, les tireurs alignés par équipe, projetant leur flèche tous en même temps, conféraient une classe particulière à l’épreuve.
Je vous relate ce souvenir avec une certaine nostalgie et je pensais que la flèche polynésienne n’existait plus que dans mes souvenirs de colon. Mais c’est avec émotion que j’ai trouvé sur le Web des guides de confection, exactement comme nous faisions il y a presque soixante ans. Comme quoi il est encore possible de bien s’amuser avec un peu d’initiative et des mains pleines de doigts.
bonne reprise à tous les actifs (cotisants
)