Ce que rien ne pourra effacer de nos mémoires ...
Posté : ven. févr. 04, 2011 10:59 am
Merci Vincent de cette idée ... et Merci G2
16h00
Nous arrivons au ministère des affaires étrangères. Moral en berne mais nous espérons. Quoi ? Un miracle, peut-être.
Au moment de prendre l’ascenseur, une française déguisée en autochtone, monte avec nous.
« Vous allez voir Monsieur Mensah ? » nous demande-t-elle.
« Oui, comment le savez vous ? »
« Tous les français qui prennent cet ascenseur, font parti d’une ONG et vont voir Monsieur Mensah »
« Vous le connaissez bien ? »
« Très bien. Je faisais parti d’une antenne de pharmacie sans frontière à Avignon… »
« Monique ? » répond eVe
« Oui. On se connait ? »
« C’est moi qui collectais les médicaments et les apportais à Avignon. »
« Oui, ça y est, je te remets »
Discussion, explication.
Monique connait très bien Monsieur Mensah. Elle vient pour l’inviter à une réception. Elle n’a pas besoin de rendez vous pour le rencontrer.
Son association dispose d’un accord de siège au Bénin, ils se voient souvent.
« Bon, je viens avec vous et l’on va régler cela ! »
Le miracle attendu est là !
Nous sommes aussitôt reçus par le directeur de la coopération décentralisée.
« Ha !!! Mes amis. Vous connaissez Monique ? Vous êtes en excellente compagnie. Voyons votre dossier. »
Monique.
« J’ai réfléchie, est-ce que ‘on pourrait faire passer ce container par mon association qui a un accord de siège et est exonéré de frais de douanes. »
« Pas des frais fixes qui sont dans tous les cas inévitables et assez importants. »
MR Mensah consulte les papiers.
« Mais le connaissement est au nom de l’hôpital et la demande d’exonération signée par le Mairie. Il faut que les deux correspondent au même nom. On ne peut rien faire. »
« Changer le non ? »
« Cela serait trop cher et trop long. Il faut téléphoner immédiatement au directeur de l’hôpital afin qu’il refasse le courrier et me l’envoie par internet. »
Sitôt dit, sitôt fait.
Le directeur de l’hôpital note l’adresse de Monsieur Mensah, se met au travail et nous promet le courrier dans une heure au plus tard.
Monsieur Mensah :
« Je pourrai transmettre ce courrier lundi, car dans une heure les bureaux seront fermés et vous aurez une réponse dans une semaine environ. »
« Dans une semaine ? Mais le bateau arrive le 15 en rade et nos partenaires le 18. »
« Oui, une semaine grâce à mon intervention. Et si votre bateau arrive en rade le 15, il ne sera pas à quai avant le 25, si tout ce passe bien ce dont je doute fort. Il y a eu des grèves récemment et je suis d’avis que votre container ne sera pas à quai avant 1 semaine, avec de la chance, mais comptez plutôt 15 jours à trois semaines. »
Nous restons encore quelques instants à discuter à essayer de trouver une solution. En vain.
Monique nous invite à un pot vers 20h00 à l’hôtel de Lac. Nous acceptons. Cela pourra nous changer les idées. Je n’ai pas bu une béninoise de la journée !
eVe et moi sommes à ramasser à la petite cuillère.
Bienvenu nous encourage, Lucien aussi. Bienvenu nous promet de faire intervenir quelqu’un de la présidence.
eVe se redresse. Je suis un zombi.
Nous retournons au ministère des PME/PMI.
J’écris à Daniel
« Cher Daniel
Comme promis, puisque j'ai accès à internet je t'envoie mes bons souvenirs de Banikoara, ou plutôt de Cotonou où nous vivons de grands moments de galères en ce moment.
Je suis chez l'assistant du ministre des PME/PMI pour résoudre les problèmes de douane, ce qui est très loin d'être évident. Le container arrive en rade le 16 et, contrairement à ce que nous dit l'armateur, il ne faudra pas 2 jours pour le sortir mais une semaine si tout ce passe bien.
Arrivés à Banikoara, alors que tout devait être fait par les autorités locales, rien ne l'avait été.
Voilà, tu t'imagines un peu, mais, bon, on savait où on allait.
Au moment où je t'écris cette ligne, panne d'électricité subite mais habituelle, Cotonou est dans le noir absolu, seul l'écran de l'assistant du ministre me donne de la lumière.
Nous allons improviser à partir de demain, sans savoir si nous reviendrons en France en ayant pris possession et déchargé le container.
Il va falloir faire 28h00 de route pour récupérer nos bagages qui sont restés au nord........
Amitiés
Michel »
Les cigarettes continuent à brûler les semelles de mes chaussures.
Bienvenu, m’appelle et me tend le téléphone.
C’est Marcelin le transitaire.
« Monsieur Michel, je voudrais une précision. Vous dépotez au quai ou à Banikoara ? »
« Le matériel est trop fragile, je dépote à Banikoara. »
« Boon, dans ce cas, il faudra compte 500000 CFA de plus pour la consigne du container ! »
Je ne réponds rien, ou alors simplement un OK imperceptible.
Il nous faut 3000000 CFA pour sortir ce container dont on ne sait même pas s’il sera à quai le 18.
Je transmets à eVe, Lucien et Bienvenu. Je ne suis plus qu’une loque.
eVe sois forte et soutiens moi !
Plus personne n’ose me parler.
Je fume, je fume, cigarette sur cigarette.
« Tans pis. J’annule la mission dentaire, tu rentres en France, préviens mes potes Etienne et Philippe de répartir mes soins et je rentre lorsque le container est à destination. Je ne lâcherai rien. Banikoara attend celui-ci depuis trop longtemps. Nous ne pouvons le laisser à quai pour qu’il finisse de disparaître. »
« Pas question. Si nous n’y arrivons pas dans les délais je reste avec toi au moins une semaine. Je le peux. Attendons 20h00. Avec Monique nous trouverons peut-être une solution.»
Je perds l’équilibre, m’assoies, fume, fume, fume.
Lucien me parle des lions.
eVe me prends la main, me soutient de son regard que je sens fort.
Bienvenu téléphone. Il faut un contact.
Nous arrivons au ministère des affaires étrangères. Moral en berne mais nous espérons. Quoi ? Un miracle, peut-être.
Au moment de prendre l’ascenseur, une française déguisée en autochtone, monte avec nous.
« Vous allez voir Monsieur Mensah ? » nous demande-t-elle.
« Oui, comment le savez vous ? »
« Tous les français qui prennent cet ascenseur, font parti d’une ONG et vont voir Monsieur Mensah »
« Vous le connaissez bien ? »
« Très bien. Je faisais parti d’une antenne de pharmacie sans frontière à Avignon… »
« Monique ? » répond eVe
« Oui. On se connait ? »
« C’est moi qui collectais les médicaments et les apportais à Avignon. »
« Oui, ça y est, je te remets »
Discussion, explication.
Monique connait très bien Monsieur Mensah. Elle vient pour l’inviter à une réception. Elle n’a pas besoin de rendez vous pour le rencontrer.
Son association dispose d’un accord de siège au Bénin, ils se voient souvent.
« Bon, je viens avec vous et l’on va régler cela ! »
Le miracle attendu est là !
Nous sommes aussitôt reçus par le directeur de la coopération décentralisée.
« Ha !!! Mes amis. Vous connaissez Monique ? Vous êtes en excellente compagnie. Voyons votre dossier. »
Monique.
« J’ai réfléchie, est-ce que ‘on pourrait faire passer ce container par mon association qui a un accord de siège et est exonéré de frais de douanes. »
« Pas des frais fixes qui sont dans tous les cas inévitables et assez importants. »
MR Mensah consulte les papiers.
« Mais le connaissement est au nom de l’hôpital et la demande d’exonération signée par le Mairie. Il faut que les deux correspondent au même nom. On ne peut rien faire. »
« Changer le non ? »
« Cela serait trop cher et trop long. Il faut téléphoner immédiatement au directeur de l’hôpital afin qu’il refasse le courrier et me l’envoie par internet. »
Sitôt dit, sitôt fait.
Le directeur de l’hôpital note l’adresse de Monsieur Mensah, se met au travail et nous promet le courrier dans une heure au plus tard.
Monsieur Mensah :
« Je pourrai transmettre ce courrier lundi, car dans une heure les bureaux seront fermés et vous aurez une réponse dans une semaine environ. »
« Dans une semaine ? Mais le bateau arrive le 15 en rade et nos partenaires le 18. »
« Oui, une semaine grâce à mon intervention. Et si votre bateau arrive en rade le 15, il ne sera pas à quai avant le 25, si tout ce passe bien ce dont je doute fort. Il y a eu des grèves récemment et je suis d’avis que votre container ne sera pas à quai avant 1 semaine, avec de la chance, mais comptez plutôt 15 jours à trois semaines. »
Nous restons encore quelques instants à discuter à essayer de trouver une solution. En vain.
Monique nous invite à un pot vers 20h00 à l’hôtel de Lac. Nous acceptons. Cela pourra nous changer les idées. Je n’ai pas bu une béninoise de la journée !
eVe et moi sommes à ramasser à la petite cuillère.
Bienvenu nous encourage, Lucien aussi. Bienvenu nous promet de faire intervenir quelqu’un de la présidence.
eVe se redresse. Je suis un zombi.
Nous retournons au ministère des PME/PMI.
J’écris à Daniel
« Cher Daniel
Comme promis, puisque j'ai accès à internet je t'envoie mes bons souvenirs de Banikoara, ou plutôt de Cotonou où nous vivons de grands moments de galères en ce moment.
Je suis chez l'assistant du ministre des PME/PMI pour résoudre les problèmes de douane, ce qui est très loin d'être évident. Le container arrive en rade le 16 et, contrairement à ce que nous dit l'armateur, il ne faudra pas 2 jours pour le sortir mais une semaine si tout ce passe bien.
Arrivés à Banikoara, alors que tout devait être fait par les autorités locales, rien ne l'avait été.
Voilà, tu t'imagines un peu, mais, bon, on savait où on allait.
Au moment où je t'écris cette ligne, panne d'électricité subite mais habituelle, Cotonou est dans le noir absolu, seul l'écran de l'assistant du ministre me donne de la lumière.
Nous allons improviser à partir de demain, sans savoir si nous reviendrons en France en ayant pris possession et déchargé le container.
Il va falloir faire 28h00 de route pour récupérer nos bagages qui sont restés au nord........
Amitiés
Michel »
Les cigarettes continuent à brûler les semelles de mes chaussures.
Bienvenu, m’appelle et me tend le téléphone.
C’est Marcelin le transitaire.
« Monsieur Michel, je voudrais une précision. Vous dépotez au quai ou à Banikoara ? »
« Le matériel est trop fragile, je dépote à Banikoara. »
« Boon, dans ce cas, il faudra compte 500000 CFA de plus pour la consigne du container ! »
Je ne réponds rien, ou alors simplement un OK imperceptible.
Il nous faut 3000000 CFA pour sortir ce container dont on ne sait même pas s’il sera à quai le 18.
Je transmets à eVe, Lucien et Bienvenu. Je ne suis plus qu’une loque.
eVe sois forte et soutiens moi !
Plus personne n’ose me parler.
Je fume, je fume, cigarette sur cigarette.
« Tans pis. J’annule la mission dentaire, tu rentres en France, préviens mes potes Etienne et Philippe de répartir mes soins et je rentre lorsque le container est à destination. Je ne lâcherai rien. Banikoara attend celui-ci depuis trop longtemps. Nous ne pouvons le laisser à quai pour qu’il finisse de disparaître. »
« Pas question. Si nous n’y arrivons pas dans les délais je reste avec toi au moins une semaine. Je le peux. Attendons 20h00. Avec Monique nous trouverons peut-être une solution.»
Je perds l’équilibre, m’assoies, fume, fume, fume.
Lucien me parle des lions.
eVe me prends la main, me soutient de son regard que je sens fort.
Bienvenu téléphone.
Il faut un contact.
Fin de cette journée interminable
Il est bientôt 20h00.
Bienvenu propose de nous accompagner tour à tour à l’hôtel du Lac. Sa soeur nous a rejoint.
En fin de compte, elle et eVe seront du premier voyage ; trois sur un scooter c’est habituel.
Lucien prendra un zem (taxi moto) et moi je monterai derrière Bienvenu.
L’hôtel est à quelques minutes du Ministère.
Hôtel 4 ****, avec piscine, vu sur l’estuaire, et tout le luxe que l’on n’offre pas nous même en France.
Monique et nous ne jouons pas dans la même cour. Ce soir elle reçoit quelques missionnaires pour arroser leur retour en Europe. Ils logent dans cet hôtel.
Nous nous installons à sa table, je commande une béninoise, la première de la journée. 33cc / 1250CFA au lieu de 66cc/500Cfa.
J’ai vraiment soif, j’en prendrai 2, eVe et la soeur de Bienvenu prennent un jus de fruit, Lucien et ce dernier me suivent. Nous mangerons aussi une pizza. Total 24000CFA. Cela fait peut-être bizarre de voir parler petits sous mais avec cette somme nous mangeons et buvons habituellement pendant 3 jours à trois.
Je ne suis pas mieux.
Que fais-je ici à écouter Monique nous materner ; moi je sais tout, mes pauvres petits vous êtes dans une galères, si vous aviez sus vous seriez venus me voir bien avant etc. MOI JE N’AI JAMAIS ARROSE PERSONNE, clame-t-elle, hors de propos mais très fort afin que tous l’entende.
Lorsque l’on parle si fort…….souvent…..
Il n’y a que des tables de blancs et moi je suis noir ; noir de peau comme Bienvenu, Lucien et sa soeur et comme tous les noirs d’Afrique sub-saharienne.
Oui je suis noir et je m’éloigne avec Bienvenu auquel notre hôte ne prête guère attention. Et je ressens cette indifférence comme si elle me concernait. Mais il faut faire bonne figure.
Monique ne propose aucune solution, nous invite à une réception le 18 en fin d’après midi. Il y aura plein de beau monde.
Je propose à eVe d’annuler la mission dentaire.
« La nuit porte conseil, attendons demain. »
Je reste à l’écart avec mes frères noirs. Nous ne nous sentons pas chez nous, dans notre Bénin.
Le temps passe. Richard, un dentiste Béninois arrive. Nous discutons, mais il est très absorbé par les paillettes. Monique règlera ses consommations.23h00, il faut rentrer. Nous prenons quelques photos.
Personne ne veut nous raccompagner à Porto Novo.
La route est trop dangereuse à cette heure.
Mon téléphone est déchargé, Lucien n’a plus de crédit, nous ne pouvons prévenir personne.
Richard nous propose de nous héberger. Nous préférerions rentrer mais finissons par accepter cette invitation.
Demain sera un autre jour.
Richard est sympa. Il nous parle de notre association partenaire, de l’équipe qui doit nous rejoindre, des dentistes qui ont annulé la mission. Ces derniers seraient les sages. Il n’a pas de mots vraiment gentils pour l’équipe qui arrive.
C’est rassurant…… Pourtant en France il n’y avait que compliments des uns envers les autres.
Lorsque Marc m’avait annoncé la défection des dentistes, ses mots avaient été durs et j’avais mis cela sur le coup de la colère. Mais non, c’était en fait ce qu’il pensait réellement.
Nous sommes installés dans une chambre séparée, Richard a la sienne. Lucien dormira dans le salon dans un canapé lit.
Malgré nos soucis, la fatigue l’emporte et nous nous endormons très vite.
Demain sera un autre jour.
16h00
Nous arrivons au ministère des affaires étrangères. Moral en berne mais nous espérons. Quoi ? Un miracle, peut-être.
Au moment de prendre l’ascenseur, une française déguisée en autochtone, monte avec nous.
« Vous allez voir Monsieur Mensah ? » nous demande-t-elle.
« Oui, comment le savez vous ? »
« Tous les français qui prennent cet ascenseur, font parti d’une ONG et vont voir Monsieur Mensah »
« Vous le connaissez bien ? »
« Très bien. Je faisais parti d’une antenne de pharmacie sans frontière à Avignon… »
« Monique ? » répond eVe
« Oui. On se connait ? »
« C’est moi qui collectais les médicaments et les apportais à Avignon. »
« Oui, ça y est, je te remets »
Discussion, explication.
Monique connait très bien Monsieur Mensah. Elle vient pour l’inviter à une réception. Elle n’a pas besoin de rendez vous pour le rencontrer.
Son association dispose d’un accord de siège au Bénin, ils se voient souvent.
« Bon, je viens avec vous et l’on va régler cela ! »
Le miracle attendu est là !
Nous sommes aussitôt reçus par le directeur de la coopération décentralisée.
« Ha !!! Mes amis. Vous connaissez Monique ? Vous êtes en excellente compagnie. Voyons votre dossier. »
Monique.
« J’ai réfléchie, est-ce que ‘on pourrait faire passer ce container par mon association qui a un accord de siège et est exonéré de frais de douanes. »
« Pas des frais fixes qui sont dans tous les cas inévitables et assez importants. »
MR Mensah consulte les papiers.
« Mais le connaissement est au nom de l’hôpital et la demande d’exonération signée par le Mairie. Il faut que les deux correspondent au même nom. On ne peut rien faire. »
« Changer le non ? »
« Cela serait trop cher et trop long. Il faut téléphoner immédiatement au directeur de l’hôpital afin qu’il refasse le courrier et me l’envoie par internet. »
Sitôt dit, sitôt fait.
Le directeur de l’hôpital note l’adresse de Monsieur Mensah, se met au travail et nous promet le courrier dans une heure au plus tard.
Monsieur Mensah :
« Je pourrai transmettre ce courrier lundi, car dans une heure les bureaux seront fermés et vous aurez une réponse dans une semaine environ. »
« Dans une semaine ? Mais le bateau arrive le 15 en rade et nos partenaires le 18. »
« Oui, une semaine grâce à mon intervention. Et si votre bateau arrive en rade le 15, il ne sera pas à quai avant le 25, si tout ce passe bien ce dont je doute fort. Il y a eu des grèves récemment et je suis d’avis que votre container ne sera pas à quai avant 1 semaine, avec de la chance, mais comptez plutôt 15 jours à trois semaines. »
Nous restons encore quelques instants à discuter à essayer de trouver une solution. En vain.
Monique nous invite à un pot vers 20h00 à l’hôtel de Lac. Nous acceptons. Cela pourra nous changer les idées. Je n’ai pas bu une béninoise de la journée !
eVe et moi sommes à ramasser à la petite cuillère.
Bienvenu nous encourage, Lucien aussi. Bienvenu nous promet de faire intervenir quelqu’un de la présidence.
eVe se redresse. Je suis un zombi.
Nous retournons au ministère des PME/PMI.
J’écris à Daniel
« Cher Daniel
Comme promis, puisque j'ai accès à internet je t'envoie mes bons souvenirs de Banikoara, ou plutôt de Cotonou où nous vivons de grands moments de galères en ce moment.
Je suis chez l'assistant du ministre des PME/PMI pour résoudre les problèmes de douane, ce qui est très loin d'être évident. Le container arrive en rade le 16 et, contrairement à ce que nous dit l'armateur, il ne faudra pas 2 jours pour le sortir mais une semaine si tout ce passe bien.
Arrivés à Banikoara, alors que tout devait être fait par les autorités locales, rien ne l'avait été.
Voilà, tu t'imagines un peu, mais, bon, on savait où on allait.
Au moment où je t'écris cette ligne, panne d'électricité subite mais habituelle, Cotonou est dans le noir absolu, seul l'écran de l'assistant du ministre me donne de la lumière.
Nous allons improviser à partir de demain, sans savoir si nous reviendrons en France en ayant pris possession et déchargé le container.
Il va falloir faire 28h00 de route pour récupérer nos bagages qui sont restés au nord........
Amitiés
Michel »
Les cigarettes continuent à brûler les semelles de mes chaussures.
Bienvenu, m’appelle et me tend le téléphone.
C’est Marcelin le transitaire.
« Monsieur Michel, je voudrais une précision. Vous dépotez au quai ou à Banikoara ? »
« Le matériel est trop fragile, je dépote à Banikoara. »
« Boon, dans ce cas, il faudra compte 500000 CFA de plus pour la consigne du container ! »
Je ne réponds rien, ou alors simplement un OK imperceptible.
Il nous faut 3000000 CFA pour sortir ce container dont on ne sait même pas s’il sera à quai le 18.
Je transmets à eVe, Lucien et Bienvenu. Je ne suis plus qu’une loque.
eVe sois forte et soutiens moi !
Plus personne n’ose me parler.
Je fume, je fume, cigarette sur cigarette.
« Tans pis. J’annule la mission dentaire, tu rentres en France, préviens mes potes Etienne et Philippe de répartir mes soins et je rentre lorsque le container est à destination. Je ne lâcherai rien. Banikoara attend celui-ci depuis trop longtemps. Nous ne pouvons le laisser à quai pour qu’il finisse de disparaître. »
« Pas question. Si nous n’y arrivons pas dans les délais je reste avec toi au moins une semaine. Je le peux. Attendons 20h00. Avec Monique nous trouverons peut-être une solution.»
Je perds l’équilibre, m’assoies, fume, fume, fume.
Lucien me parle des lions.
eVe me prends la main, me soutient de son regard que je sens fort.
Bienvenu téléphone. Il faut un contact.
Nous arrivons au ministère des affaires étrangères. Moral en berne mais nous espérons. Quoi ? Un miracle, peut-être.
Au moment de prendre l’ascenseur, une française déguisée en autochtone, monte avec nous.
« Vous allez voir Monsieur Mensah ? » nous demande-t-elle.
« Oui, comment le savez vous ? »
« Tous les français qui prennent cet ascenseur, font parti d’une ONG et vont voir Monsieur Mensah »
« Vous le connaissez bien ? »
« Très bien. Je faisais parti d’une antenne de pharmacie sans frontière à Avignon… »
« Monique ? » répond eVe
« Oui. On se connait ? »
« C’est moi qui collectais les médicaments et les apportais à Avignon. »
« Oui, ça y est, je te remets »
Discussion, explication.
Monique connait très bien Monsieur Mensah. Elle vient pour l’inviter à une réception. Elle n’a pas besoin de rendez vous pour le rencontrer.
Son association dispose d’un accord de siège au Bénin, ils se voient souvent.
« Bon, je viens avec vous et l’on va régler cela ! »
Le miracle attendu est là !
Nous sommes aussitôt reçus par le directeur de la coopération décentralisée.
« Ha !!! Mes amis. Vous connaissez Monique ? Vous êtes en excellente compagnie. Voyons votre dossier. »
Monique.
« J’ai réfléchie, est-ce que ‘on pourrait faire passer ce container par mon association qui a un accord de siège et est exonéré de frais de douanes. »
« Pas des frais fixes qui sont dans tous les cas inévitables et assez importants. »
MR Mensah consulte les papiers.
« Mais le connaissement est au nom de l’hôpital et la demande d’exonération signée par le Mairie. Il faut que les deux correspondent au même nom. On ne peut rien faire. »
« Changer le non ? »
« Cela serait trop cher et trop long. Il faut téléphoner immédiatement au directeur de l’hôpital afin qu’il refasse le courrier et me l’envoie par internet. »
Sitôt dit, sitôt fait.
Le directeur de l’hôpital note l’adresse de Monsieur Mensah, se met au travail et nous promet le courrier dans une heure au plus tard.
Monsieur Mensah :
« Je pourrai transmettre ce courrier lundi, car dans une heure les bureaux seront fermés et vous aurez une réponse dans une semaine environ. »
« Dans une semaine ? Mais le bateau arrive le 15 en rade et nos partenaires le 18. »
« Oui, une semaine grâce à mon intervention. Et si votre bateau arrive en rade le 15, il ne sera pas à quai avant le 25, si tout ce passe bien ce dont je doute fort. Il y a eu des grèves récemment et je suis d’avis que votre container ne sera pas à quai avant 1 semaine, avec de la chance, mais comptez plutôt 15 jours à trois semaines. »
Nous restons encore quelques instants à discuter à essayer de trouver une solution. En vain.
Monique nous invite à un pot vers 20h00 à l’hôtel de Lac. Nous acceptons. Cela pourra nous changer les idées. Je n’ai pas bu une béninoise de la journée !
eVe et moi sommes à ramasser à la petite cuillère.
Bienvenu nous encourage, Lucien aussi. Bienvenu nous promet de faire intervenir quelqu’un de la présidence.
eVe se redresse. Je suis un zombi.
Nous retournons au ministère des PME/PMI.
J’écris à Daniel
« Cher Daniel
Comme promis, puisque j'ai accès à internet je t'envoie mes bons souvenirs de Banikoara, ou plutôt de Cotonou où nous vivons de grands moments de galères en ce moment.
Je suis chez l'assistant du ministre des PME/PMI pour résoudre les problèmes de douane, ce qui est très loin d'être évident. Le container arrive en rade le 16 et, contrairement à ce que nous dit l'armateur, il ne faudra pas 2 jours pour le sortir mais une semaine si tout ce passe bien.
Arrivés à Banikoara, alors que tout devait être fait par les autorités locales, rien ne l'avait été.
Voilà, tu t'imagines un peu, mais, bon, on savait où on allait.
Au moment où je t'écris cette ligne, panne d'électricité subite mais habituelle, Cotonou est dans le noir absolu, seul l'écran de l'assistant du ministre me donne de la lumière.
Nous allons improviser à partir de demain, sans savoir si nous reviendrons en France en ayant pris possession et déchargé le container.
Il va falloir faire 28h00 de route pour récupérer nos bagages qui sont restés au nord........
Amitiés
Michel »
Les cigarettes continuent à brûler les semelles de mes chaussures.
Bienvenu, m’appelle et me tend le téléphone.
C’est Marcelin le transitaire.
« Monsieur Michel, je voudrais une précision. Vous dépotez au quai ou à Banikoara ? »
« Le matériel est trop fragile, je dépote à Banikoara. »
« Boon, dans ce cas, il faudra compte 500000 CFA de plus pour la consigne du container ! »
Je ne réponds rien, ou alors simplement un OK imperceptible.
Il nous faut 3000000 CFA pour sortir ce container dont on ne sait même pas s’il sera à quai le 18.
Je transmets à eVe, Lucien et Bienvenu. Je ne suis plus qu’une loque.
eVe sois forte et soutiens moi !
Plus personne n’ose me parler.
Je fume, je fume, cigarette sur cigarette.
« Tans pis. J’annule la mission dentaire, tu rentres en France, préviens mes potes Etienne et Philippe de répartir mes soins et je rentre lorsque le container est à destination. Je ne lâcherai rien. Banikoara attend celui-ci depuis trop longtemps. Nous ne pouvons le laisser à quai pour qu’il finisse de disparaître. »
« Pas question. Si nous n’y arrivons pas dans les délais je reste avec toi au moins une semaine. Je le peux. Attendons 20h00. Avec Monique nous trouverons peut-être une solution.»
Je perds l’équilibre, m’assoies, fume, fume, fume.
Lucien me parle des lions.
eVe me prends la main, me soutient de son regard que je sens fort.
Bienvenu téléphone.
Il faut un contact.
Fin de cette journée interminable
Il est bientôt 20h00.
Bienvenu propose de nous accompagner tour à tour à l’hôtel du Lac. Sa soeur nous a rejoint.
En fin de compte, elle et eVe seront du premier voyage ; trois sur un scooter c’est habituel.
Lucien prendra un zem (taxi moto) et moi je monterai derrière Bienvenu.
L’hôtel est à quelques minutes du Ministère.
Hôtel 4 ****, avec piscine, vu sur l’estuaire, et tout le luxe que l’on n’offre pas nous même en France.
Monique et nous ne jouons pas dans la même cour. Ce soir elle reçoit quelques missionnaires pour arroser leur retour en Europe. Ils logent dans cet hôtel.
Nous nous installons à sa table, je commande une béninoise, la première de la journée. 33cc / 1250CFA au lieu de 66cc/500Cfa.
J’ai vraiment soif, j’en prendrai 2, eVe et la soeur de Bienvenu prennent un jus de fruit, Lucien et ce dernier me suivent. Nous mangerons aussi une pizza. Total 24000CFA. Cela fait peut-être bizarre de voir parler petits sous mais avec cette somme nous mangeons et buvons habituellement pendant 3 jours à trois.
Je ne suis pas mieux.
Que fais-je ici à écouter Monique nous materner ; moi je sais tout, mes pauvres petits vous êtes dans une galères, si vous aviez sus vous seriez venus me voir bien avant etc. MOI JE N’AI JAMAIS ARROSE PERSONNE, clame-t-elle, hors de propos mais très fort afin que tous l’entende.
Lorsque l’on parle si fort…….souvent…..
Il n’y a que des tables de blancs et moi je suis noir ; noir de peau comme Bienvenu, Lucien et sa soeur et comme tous les noirs d’Afrique sub-saharienne.
Oui je suis noir et je m’éloigne avec Bienvenu auquel notre hôte ne prête guère attention. Et je ressens cette indifférence comme si elle me concernait. Mais il faut faire bonne figure.
Monique ne propose aucune solution, nous invite à une réception le 18 en fin d’après midi. Il y aura plein de beau monde.
Je propose à eVe d’annuler la mission dentaire.
« La nuit porte conseil, attendons demain. »
Je reste à l’écart avec mes frères noirs. Nous ne nous sentons pas chez nous, dans notre Bénin.
Le temps passe. Richard, un dentiste Béninois arrive. Nous discutons, mais il est très absorbé par les paillettes. Monique règlera ses consommations.23h00, il faut rentrer. Nous prenons quelques photos.
Personne ne veut nous raccompagner à Porto Novo.
La route est trop dangereuse à cette heure.
Mon téléphone est déchargé, Lucien n’a plus de crédit, nous ne pouvons prévenir personne.
Richard nous propose de nous héberger. Nous préférerions rentrer mais finissons par accepter cette invitation.
Demain sera un autre jour.
Richard est sympa. Il nous parle de notre association partenaire, de l’équipe qui doit nous rejoindre, des dentistes qui ont annulé la mission. Ces derniers seraient les sages. Il n’a pas de mots vraiment gentils pour l’équipe qui arrive.
C’est rassurant…… Pourtant en France il n’y avait que compliments des uns envers les autres.
Lorsque Marc m’avait annoncé la défection des dentistes, ses mots avaient été durs et j’avais mis cela sur le coup de la colère. Mais non, c’était en fait ce qu’il pensait réellement.
Nous sommes installés dans une chambre séparée, Richard a la sienne. Lucien dormira dans le salon dans un canapé lit.
Malgré nos soucis, la fatigue l’emporte et nous nous endormons très vite.
Demain sera un autre jour.